Grosse nuit pour les papillons !
juillet 31, 2022

Ce jeudi 28 juillet, Marc Thibault est venu de Camargue pour venir participer à l’exploration du vivant sur la ferme. Ornithologue, il est également entomologiste, en particulier spécialisé sur les papillons de nuit (hétérocères) et les punaises. Il fait suite au passage de deux autres lépidoptéristes déjà venus spécifiquement pour inventorier les papillons de nuit sur la ferme depuis le week-end de lancement des inventaires : Patrick Rosset et Didier Perrocheau.

Ce jeudi, les bonnes conditions étaient réunies : temps chaud et orageux, pas de lune. Les deux draps blancs, suspendus à 300 m de distance, étaient chacun placés devant une lépiled, une ampoule qui rayonne dans les ultra-violets. Le spectacle fut au rendez-vous pour Marc, Sébastien, Céline et Maxime : les draps étaient remplis de plusieurs milliers d’insectes : papillons de nuit en majorité, mais aussi des trichoptères, des carabes, quelques hydrophilidés, ichneumonidés, frelons, fourmilions et mantispes. Parmi les papillons, une espèce dominait, l’Hydrille domestique (Athetis hospes), dont nous avons estimé le total à un millier d’individus. Mais cette abondance n’a pas découragé les autres : plus de 100 espèces étaient présentes sur les draps. En tout, couplé avec une balade diurne de 4h sur la ferme précédent le dispositif nocturne, Marc a relevé la présence de 151 espècesd’hétérocères, dont 120 sont déjà identifiées. D’autres, de très petite taille, nécessiteront un examen approfondi par les rares spécialistes de certains groupes méconnus. Les chiffres, sortis de leur contexte, parlent peu, mais pour une seule nuit, n’importe où en France, c’est beaucoup ! Marc avait rarement vu une telle abondance, en particulier. Cette richesse était particulièrement notable chez les papillons du groupe des pyrales et des crambidés, chez lesquels nous avons relevé une présence importante d’espèces méditerranéennes (par exemple : Oxybia transversella, Isauria dilucidella, Psorosa dahliella). Le peuplement était sinon dominé par des espèces de la strate herbacée, ainsi que par des espèces de boisements plus ou moins humides (peupleraies/frênaies), en lien avec la ripisylve du Guimand (exemples : Earias vernana, Stegania trimaculata, Sciota rhenella, Euzophera pinguis). Au moins deux espèces ne semblaient pas à ce jour avoir été rencontrées dans la Drôme (à moins que de telles données soient restées dans les carnets des naturalistes) : l’Anthophile des Inules (Eublemma parva) et la Phycide luisante (Isauria dilucidella). Les plus spectaculaires ont sinon été les 4 sphinx venus nous rendre visite : le Petit Sphinx de la vigne, le Sphinx du liseron, le Sphinx livournien et le Sphinx du Tilleul.

Deux enseignements notables : l’un des deux dispositifs lumineux était placé dans le verger au milieu des pommiers. Et bien nous n’avons eu que deux Carpocapses du pommier (Cydia pommonella). Il faut croire que la diversité et la fonctionnalité de l’écosystème ne favorisent pas la surabondance de cette espèce qui pose des problèmes aux arboriculteurs ! Le vivant comme solution…

Autre enseignement : le passage précoce des brebis dans le verger ce printemps permet à celui-ci d’être dans un état de floraison élevé en plein été, à un moment ou les habitats agricoles sont plus verts que les environs car ayant pu bénéficier d’un peu d’irrigation. Ils deviennent donc vraisemblablement très attractifs pour les insectes et leurs prédateurs ! L’alliance entre irrigation et vie sauvage peut trouver des voies intéressantes.

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